Une fin d’année en demi-teinte
L’année 2024 s’achève, et avec elle une année d’élections en Belgique, en Europe et dans le monde, qui n’aura pas apporté de grands espoirs aux forces progressistes, c’est le moins que l’on puisse dire. La droitisation et même l’extrême droitisation de nombre de gouvernements, on s’y attendait, c’est vrai, mais sans pouvoir s’empêcher d’espérer quand même un sursaut ici et là. Aux États-Unis par exemple, avec la candidate démocrate Kamala Harris lancée tardivement mais tous azimuts. Peine perdue, le vainqueur fut quand même Donald Trump. L’on n’a pas fini de conjecturer à propos de son programme : en a-t-il réellement un ou avancera-t-il en fonction des événements, derrière une communication simpliste et injurieuse qui fait le bonheur de ses fans ?
Pendant ce temps et sans que cela ne crée de tsunami politique, l’extrême-droite fait son entrée dans l’exécutif de l’Union européenne, avec un titre qui pèse sur le plan symbolique : Raffaele Fitto est en effet devenu vice-président de la Commission européenne en charge de la Cohésion (les politiques régionales) et des Réformes (structurelles, pour relancer la croissance). L’homme est issu des rangs de Fratelli d’Italia, le parti d’extrême droite de Giorgia Meloni, actuelle cheffe du gouvernement italien.
On aurait bien aimé pouvoir soigner nos aspirations démocratiques en berne en lorgnant du côté des scrutins plus micros, là où le local compte davantage, du côté de nos élections communales. À voir comment un peu partout les petits calculs et les grandes ambitions font et défont les alliances et les inimitiés - sans toujours tenir grand compte des idées ni des programmes-, ce ne sont sans doute pas ces résultats-là qui nous consoleront.
Démocratie en action dans ma commune aussi : c’est parti!
Le 13 octobre prochain, nous choisirons celles et ceux que nous désirons voir nous représenter au sein de notre commune et des Provinces, sauf à Bruxelles, une exception puisque cette Région ne dispose plus de province. Ces hommes et femmes qui se présentent au suffrage sont généralement entrés en politique dans l’espoir de concrétiser un programme correspondant à leurs valeurs. En cela, leur engagement est à saluer, car la mission est tout sauf facile. Voter est une conquête historique et surtout une étape importante dans la vie démocratique, mais elle ne la résume pas. C’est souvent là que le bât blesse. À tous les niveaux de pouvoir, les majorités qui prennent en mains le pilotage peuvent être tentées de confisquer la chose publique pour garder le contrôle : « Vous m’avez élu·e, maintenant laissez-moi faire ». Le politologue Jean Faniel du CRISP rappelle souvent que de nombreux États organisent des élections sans que cela soit pour autant la garantie d’une véritable démocratie. Si le vote peut être perçu comme l’emblème de cette dernière, il est aussi devenu une sorte de mascarade pour les dictatures. Bref, le droit de vote est un précieux outil de la démocratie, mais il n’EST PAS la démocratie.
Démocratie en action : dans ma commune aussi !
Le coup de barre donné à droite lors du scrutin du 9 juin dernier laisse un gout amer. Il inquiète d’autant plus les forces de gauche que la campagne électorale a plus d’une fois illustré une porosité entre droite et extrême droite : rejet de l’immigration, discrédit jeté sur les corps intermédiaires... Le dossier de ce numéro de L’Esperluette fait le point sur les caractéristiques propres à l’idéologie de l’extrême droite, s’intéressant notamment à ses nombreuses va[1]riantes actuelles et à ses développements en Belgique. Parce qu’il est indispensable de s’outiller pour comprendre ce qui se passe un peu partout en Europe et dans le monde. Dans cet éditorial, nous voulons évoquer la prochaine campagne du CIEP, qui concernera les élections communales et provinciales. Et par là, souligner ce que nous observons depuis nos terrains d’action : d’un côté, une lassitude et une méfiance croissante vis-à-vis des institutions démocratiques ; de l’autre côté, un réel désir de participation et de démocratie. Cette campagne de sensibilisation porte ce message : la démocratie, cela commence dès le moment où quelques personnes se rassemblent et s’organisent pour améliorer quelque chose et pousser leurs élu·es à les entendre. Le parcours qu’elles feront sera aussi important que le résultat, car il est fondateur d’une puissance d’agir dont nous avons toutes et tous besoin pour nous sentir partie prenante d’une société.