Cover102La jeunesse éternelle?

On dit parfois qu’on commence à vieillir le jour de notre naissance. Cette boutade contient une vérité objective. Une trajectoire de vie est un parcours d’apprentissage et d’adaptation aux évolutions de son milieu. Ce constat vaut aussi pour les institutions et les organisations, qui naissent de la cristallisation de rêves, de volontés (collectives et individuelles), en leur donnant visibilité, stabilité et capacité d’action. Le philosophe Cornelius Castoriadis s’est penché sur ces processus qu’il appelait « instituants », présents dans toutes les sociétés et à toutes les époques. Parfois ces créations sociales dépassent les impulsions initiales, développent une existence propre ; et sont confrontées à des enjeux de survie et de recherche de sens.

Une question se pose souvent : est-ce mieux de transformer une institution qui vieillit ou d’en créer une toute nouvelle ? Selon le cybernéticien Heinz von Foerster, une question est bonne si elle n’a pas de réponse, car elle sera la source de nouvelles réflexions et de nouveaux efforts de recherche. Parfois, les institutions deviennent inadaptées, obsolètes, conservatrices, bureaucratisées ; elles peuvent se développer dans un sens opposé à celui d’origine. Et cela malgré le fait que les problèmes liés à cette création sont toujours présents, parfois même aggravés. Ou malgré que les finalités initiales, des objectifs de justice, d’égalité, d’émancipation sont encore plus pertinents que par le passé. Faut-il des nouvelles institutions ou peut-on espérer que les inerties et les routines cumulées ne nous empêchent pas de revitaliser une institution existante ? Cette bonne question nous stimule à réfléchir et être créatif. Toutefois il arrive que les conditions environnementales rendent la recherche d’une réponse plus urgente, au risque de voir mourir l’institution sans avoir construit d’alternatives.

Esperluette 102 - Octobre/Novembre/Décembre 2019

Recherche

Intranet